Migration clandestine : 2930 victimes dont 288 femmes et 101 enfants sur la route d’accès en Espagne en 2022

Dans son rapport annuel intitulé Droit à la vie-2022, dont laviesenegalaise.com a eu connaissance, l’ONG Ca-minando Fronteras a recensé 2930 victimes de la migration clandestine. La route des Îles Canaries a été la plus macabre avec 1784 victimes.  

Le rapport dévoile, entre autres, 288 femmes victimes et 101 enfants, 118 naufrages et l’utilisation des moyens de dissuasion sévères et des violations des droits des migrants.

 Ce rapport s’inscrit dans le cadre de l’Observatoire des frontières occidentales

Euro-africaines, créé en 2015 par le collectif Ca-minando Fronteras. Ce groupe recense les victimes de la migration, aussi bien sur les routes maritimes de la Méditerranée occidentale (Détroit de Gibraltar, Alboran, Algérie) et de l’Atlantique (Îles Canaries), que sur les routes terrestres au niveau des barrières de Ceuta et Melilla.

 Au total, 2 390 personnes ont perdu la vie l’année dernière. Ces chiffres sont légèrement supérieurs à ceux de 2020. Ils s’inscrivent tout de même dans la tendance haussière des décès au cours des cinq dernières années. Sur toutes les routes, maritimes et terrestres, vers l’Europe via l’État espagnol.

Sur cette dynamique, il convient de souligner l’exception de 2021. Une année fatale où 4 639 personnes sont décédées. Ce pic est lié au choc de l’augmentation exponentielle de l’utilisation de la route des Canaries.

Cette année encore, la route entre les côtes occidentales de l’Afrique du Nord et les îles Canaries se distingue comme la plus meurtrière, avec 1 784 victimes.

Dans ce rapport, le collectif Caminando Fronteras analyse une kyrielle de conséquences découlant des politiques migratoires qui entravent, obstruent ou omettent la mise en œuvre des mécanismes de sauvetage de la vie des migrants.

Par ailleurs, ce travail dévoile l’invisibilisation systématique de la route de l’Algérie, entre les côtes du nord de l’Algérie et le Levant espagnol et les Baléares. Sur cette route, au moins, 75 personnes ont perdu la vie en 2022. Le retard dans le signalement des bateaux manquants, associé à la distance et au danger de la route et à l’omission des sauvetages, place ces migrants dans une situation de vulnérabilité particulière. 

Forte baisse de l’immigration clandestine 2022

L’immigration clandestine a baissé de plus de 25% en 2022 en Espagne par rapport à 2021. Une diminution particulièrement marquée dans les arrivées par la mer, a annoncé mardi le ministère l’intérieur dans son bilan annuel. Au total, 31 219 migrants sont entrés illégalement Espagne en 2022, contre 41 945 en 2021. Soit une baisse d’environ 25,6% a rapporté le quotidien le Peuple.

Forte hausse des entrées dans les îles Canaries

Le nombre des migrants clandestins arrivés par la mer est ainsi en recul de 27,9 % par rapport à 2021. Et celui des embarcations de 20,7%. «La baisse plus significative» du nombre des arrivées clandestines concerne les Îles Canaries, un archipel espagnol situé au large des côtes nord-ouest de l’Afrique: 15 682 en 2022 contre 22 316 en 2021, soit 29,7 % en moins.

Depuis fin 2019 et le durcissement des contrôles en Méditerranée, les débarquements de migrants clandestins s’étaient multipliés aux Canaries partir des côtes africaines, en particulier de celles du Sahara occidental, une ancienne colonie espagnole dont la plus grande partie est contrôlée par le Maroc, à l’issue d’une traversée particulièrement dangereuse en raison des forts courants et de l’état des bateaux.

En revanche, les entrées par voie terrestre ont grimpé de 24,1 %. Ces entrées concernant les deux enclaves espagnoles au Maroc de Ceuta et de Melilla. Ces lieux constituent les deux seules frontières terrestres de l’Union européenne avec le continent africain.

288 femmes et 101 enfants sont morts dans leurs tentatives…

Ce rapport met également en évidence la violence différenciée subie par les femmes et l’enfance migrante. Pour les femmes, la violence sexuelle est le prix à payer sur le chemin de la migration. Cette violence sexuelle vient de leurs compagnons de voyage, des populations locales, ou dans le cadre du contrôle migratoire. En effet,  la violence est devenue l’outil institutionnel pour faire souffrir et punir les femmes migrantes. Au total, 288 femmes et 101 enfants sont morts dans leurs tentatives d’atteindre les côtes espagnoles.

Des victimes tous les mois

Selon toujours le rapport produit par le collectif Ca-minando Fronteras et confirmé par l’Observatoire des Droits humains, les mois de janvier, juin et octobre concentrent la majorité des décès et des disparitions. Cette année, ajoute l’ONG, pas un seul mois ne s’est pas passé sans qu’il y ait de morts, en moyenne, chaque jour, six personnes ont perdu la vie.

Répartition des victimes sur les différentes routes

Sur la route d’Algérie, on a noté 464 victimes, 42 décès sur la route terrestre, 75 morts sur celle. De son côté, la route du Détroit a fait 25 victimes. La route des Iles Canaries a remporté la palme avec 1784 victimes en 2022. Comme on a pu le constater, l’Atlantique a été a ensevelie beaucoup plus de personnes. Par conséquent, 91,42% des victimes disparaissent en mer. Sans que leurs corps soient retrouvés. La plupart des personnes victimes de la mer sont portées disparues. Les familles ne disposent pas de corps à identifier leur permettant de confirmer le décès. Les communautés et les familles sont confrontées à ce que l’ONG appelle «deuil ambigu». Ce qui a de multiples répercussions au niveau juridique et psychologique.

64 bateaux ont disparu avec toutes les personnes à bord

À côté de ces personnes disparues, il y a les embarcations portées disparues. Au total, 64 bateaux ont disparu avec toutes les personnes à bord. Cet état de fait rend la tache plus ardue de faire un compte-rendu fidèle de ce qui s’est passé. Sans survivants apportant des précisions sur les circonstances de la tragédie, les familles ne disposent pas d’informations indispensables au processus de deuil en l’absence d’un corps.

Au total 118 naufrages ont été recensés par l’ONG. Avec 61 naufrages, la route des Îles Canaries a été la plus dévastatrice. La route d’Algérie est arrivée en deuxième positon avec 43 naufrages. La voie d’Alboran (9 accidents) et celle de Détroit (5 accidents) ont fermé la marche.

Des violations transnationales des Droits Humains

Le collectif met à nu et dénonce l’utilisation de terribles moyens de dissuasion par les forces de police espagnoles et marocaines, y compris des balles. Comme le cas flagrant de violation transnationale des droits à la frontière terrestre entre Melilla et Nador. Dans cet incident, survenu le 24 juin, 40 personnes ont perdu la vie. Sept mois plus tard, à la fin de l’année 2022, le ministère public espagnol a clos l’enquête sur cette tragédie. Il a indiqué que ni les actions des agents, ni les refoulements ne présentaient de preuves d’un crime. Par conséquent, le rapport dénonce l’impunité de cette affaire, ainsi que la violation systématique des droits humains des deux côtés de la frontière pour les victimes et les survivants de la tragédie.

Au long de l’année, les faits suivants ont été constatés sur des collectives regroupant de nombreuses personnes, ou en groupes restreints cherchant à franchir la barrière : recours systématique à la force, violation du principe de non-refoulement, refoulements vers des pays où les personnes subissent des traitements cruels, inhumains et dégradants, violation du droit d’asile, refoulement de personnes en situation d’extrême vulnérabilité, expulsions collectives et déplacements forcés.

L’ONG Ca-minando Fronteras est un collectif qui défend les droits des personnes et des communautés en mouvement. Ce collectif est né en 2002. Il est le fruit de la rencontre et de la synergie de plusieurs défenseurs des Droits de l’Homme sur différents territoires de la frontière occidentale de l’Europe.

 

Papa FAYE – laviesenegalaise.com

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