Erratum – Rapport de la Fondation Mo Ibrahim : Précisions sur la performance du Sénégal

Quelques précisions suite à notre article publié le 16 décembre sur le classement du Sénégal dans un rapport de la fondation Mo Ibrahim. En effet, la rédaction a exploité le communiqué du conseil des ministres en rapportant les propos du Chef de l’Etat. Mercredi, le président de la République, Macky Sall, s’est félicite du dernier rapport de la Fondation Mo Ibrahim, qui classe le «Sénégal dans le Top 10 des meilleures performances avec la première place des pays de l’UEMOA et la troisième place des pays de la CEDEAO».

La Fondation a effectivement publié un nouveau rapport, mais il ne s’agit pas du rapport sur l’Indice Ibrahim, dont la dernière édition date de Novembre 2020, précise une note parvenue à laviesenegalaise.com. Dans notre texte, nous avions évoqué «L’indice Mo Ibrahim de la gouvernance africaine» en guise de rappel et de présentation de la fondation à nos lecteurs. Cela a prêté des confusions. 

En effet, le rapport auquel on fait référence a été publié le 6 décembre dernier et s’intitule « Covid-19 en Afrique : un chemin difficile vers la reprise ». Il s’appuie effectivement sur les données de l’Indice Ibrahim 2020 de gouvernance en Afrique (IIAG) qui place le Sénégal à la 9e place. En revanche, ce nouveau rapport sur la Covid-19 en Afrique visait surtout à pointer dix défis clés en matière de gouvernance et en lien avec la santé, la société et l’économie pour une reprise durable et une meilleure résilience face aux futures pandémies, selon toujours la source.

« La COVID-19 en Afrique : les défis de la reprise » fournit les performances et les tendances pour chaque pays africain par rapport à ces dix défis. Le rapport s’appuie notamment sur les données de l’IIAG 2020, qui couvrent chacun des pays du continent sur la période 2010-19.

La pandémie de COVID-19 a mis en évidence plusieurs défis structurels dans le domaine de la gouvernance. Y répondre sera indispensable pour garantir une reprise effective et durable. Mais, d’abord et avant tout, sans augmentation massive des taux de vaccination, il est illusoire de parler de reprise, ou de construction d’un avenir plus autonome.

Tel est le constat dressé par le nouveau rapport de la Fondation Mo Ibrahim, intitulé « COVID-19 en Afrique : les défis de la reprise », qui présente une analyse de l‘impact de la pandémie sur le continent africain et de la capacité des gouvernements à assurer la reprise. Si l’Afrique ne parvient pas à vacciner 70 % de sa population d’ici fin 2022, elle a peu de chances de surmonter la crise. Or, au 18 novembre 2021, seuls 6,8 % de la population du continent ont été pleinement vaccinés, et cinq pays seulement seront en mesure d’atteindre l’objectif OMS de vacciner 40 % de la population fin 2021.

La priorité absolue est donc d’augmenter au plus vite le nombre de vaccinations, en renforçant à la fois l’accès aux doses et la logistique nécessaire. Il faut en outre, en parallèle, et dès maintenant, se mettre en mesure d’accroître les capacités de production locale de vaccins afin de renforcer l’autonomie d’un continent aujourd’hui presqu’exclusivement dépendant de l’approvisionnement extérieur. Au-delà du préalable déterminant de la vaccination (le « défi zéro »), le rapport présente dix défis clés dans les domaines de la santé, de la société et de l’économie, qui doivent être relevés de manière à garantir une relance durable et à se préparer aux futures pandémies.

Élaboré à partir des données par pays sur dix ans du dernier Indice Ibrahim de la gouvernance en Afrique (IIAG) 2020, le rapport permet d’évaluer la performance de chaque pays africain concernant ces dix défis, en soulignant les réussites, mais aussi les points d’alerte.

Mo Ibrahim, Fondateur et Président de la Fondation Mo Ibrahim, a déclaré : « Dès avril dernier, nous avons souligné qu’en l’absence d’un taux adéquat de vaccination, le continent africain avait toutes les chances de devenir un parfait incubateur à variants. L’émergence d’Omicron nous rappelle que la COVID-19 demeure une crise globale, dont on ne sortira pas tant que tout le monde ne sera pas vacciné. Et pourtant nous continuons de vivre avec une inégalité démesurée dans l’accès à la vaccination qui pénalise particulièrement l’Afrique.

L’impact massif de la COVID-19 en Afrique, sur le plan sanitaire, mais aussi économique et social, a agi comme révélateur des défis complexes qui sont autant d’obstacles sur le chemin de la reprise. J’espère que ce nouveau rapport, qui s’appuie notamment sur les données de l’Indice Ibrahim, sera utile pour tous ceux qui, gouvernements, secteur privé, société civile, partenaires, ont à cœur de remettre au plus vite notre continent sur la voie de la reprise. »

– Assurer la souveraineté du continent dans le domaine de la santé

Le manque persistant de données fiables d’état-civil est un obstacle majeur pour l’élaboration de politiques sanitaires solides. Aujourd’hui encore sur le continent, seuls 10 % des décès sont enregistrés et plus de la moitié des enfants en Afrique n’ont pas d’existence légale.

L’IIAG souligne ainsi la progression dérisoire de l’indicateur État civil. L’ampleur du reste à charge des malades, et l’insuffisance notoire de l’effort budgétaire en matière de santé publique font que pour la plupart des Africains, les soins de santé ne sont ni abordables ni accessibles. En 2021, seuls dix pays, hébergeant moins de 10% de la population du continent, sont en mesure d’offrir à leurs citoyens un accès aux soins gratuit et universel.

L’indicateur Accès aux soins de santé de l’IIAG est resté quasiment statique entre 2010 et 2019. Si L’Afrique a réagi rapidement et de manière relativement bien coordonnée à la COVID-19, la plupart des pays africains sont loin d’être préparés à une future pandémie. Au niveau mondial, c’est le continent le plus en retard en ce qui concerne la mise en œuvre du Règlement sanitaire international de l’OMS.

– Menace sur les récents progrès sociaux

L’impact des fermetures d’écoles a été exacerbé par l’absence d’outils d’enseignement à distance, aggravant ainsi durablement la crise de formation préexistante à la pandémie. Si des progrès notables ont été réalisés en matière de personnel, de scolarisation et d’achèvement des études depuis 2010, la Qualité du système éducatif est l’un des 79 indicateurs de l’IIAG qui se sont le plus détériorés à l’échelle du continent, avec 30 pays en recul à cet égard.

Les femmes et les filles ont été particulièrement touchées par la pandémie, du fait de l’amenuisement des opportunités économiques, mais aussi d’une exposition accrue à la violence sexuelle et sexiste.

Pour la plupart, les mesures d’atténuation mises en place par les pays africains pour faire face à la pandémie n’ont pas intégré la problématique particulière des femmes. La COVID-19 a enfin rétréci davantage l’espace civique et la liberté des médias sur le continent. Dans le cadre de leur réponse à la COVID-19, pas moins de 44 pays africains ont restreint au moins une pratique démocratique, la liberté des médias étant la plus mise en cause.

– Le réel potentiel d’une reprise économique transformatrice fortement dépendant de nombreux obstacles

Les filets de protection sociale destinés à protéger les plus vulnérables restent marginaux. L’étroitesse des ressources fiscales qui caractérise le continent a limité à 2,4% du PIB l’enveloppe consacrée en moyenne par les gouvernements africains pour atténuer l’impact économique et social du COVID-19, soit moins de la moitié de la moyenne mondiale.

La valeur moyenne africaine de l’indicateur Filets de protection sociale n’a marqué aucun progrès depuis 2010. De façon préoccupante, l’indicateur Mobilisation d’impôts et de recettes accuse même une détérioration depuis 2015. Bien que presque tous les pays africains aient depuis 2010 amélioré leur performance pour l’indicateur Accès à l’énergie depuis 2010, l’Afrique conserve le plus faible accès à l’électricité de toutes les régions du monde. Plus de 600 millions d’Africains ne sont pas raccordés au réseau électrique, soit le double de la population totale des Etats-Unis.

De même, si, depuis 2010, tous les pays africains ont progressé au niveau de l’indicateur Accès au numérique, la fracture numérique actuelle reste un obstacle majeur à la réalisation du potentiel économique du continent.

La création récente de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), la plus grande zone de libre-échange au monde, est de nature à révolutionner le commerce intrarégional et réduire la dépendance excessive de l’Afrique vis-à-vis des marchés extérieurs, tant au niveau de l’offre que de la demande. Mais la faiblesse des réseaux de transport constitue encore un obstacle majeur à l’intégration de l’économie continentale. Ma Soukha Ba, membre du réseau Now Generation de la Fondation qui a contribué au rapport, a déclaré : « La COVID-19 a agi comme un signal d’alerte pour l’Afrique. Le modèle ancien qui consistait à être le dernier acteur des chaînes de valeur mondiales et à concurrencer ses propres voisins pour exporter des produits à faible valeur ajoutée nous dessert. Si l’Afrique veut tirer parti des possibilités offertes par la quatrième révolution industrielle – non seulement en tant que consommateur, mais aussi en tant que producteur – nous devrons nous attacher en priorité à développer le capital humain du continent.».

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