Macky Sall seul face à Yewwi

Quand on est un leader, il faut sans cesse avoir à l’esprit « qu’on peut déléguer des tâches mais pas les responsabilités ». Cela est encore plus valable quand on s’appelle Macky Sall, et que l’on dirige le Sénégal, avec la coalition BBY au pouvoir. Le peuple attend d’un leader de sa trempe, « par le rang qu’il occupe, (…) qu’il sache gouverner les hommes ; (…) qu’il sache les conduire ; (…) qu’il soit véritablement au-dessus d’eux, non pas seulement par sa dignité, mais par son esprit, par son savoir, par sa capacité, par sa conduite, par sa fermeté, par son courage et par ses vertus », comme le disait bien fort à propos le grand stratège Sun Tzu.


En tant que leader politique du régime qui incarne l’État, il a la lourde responsabilité de veiller à civiliser les rapports de sa coalition avec l’opposition, car, si la surenchère verbale les injures et les appels au meurtre de son propre camp largement relayés par la presse en ligne sont encouragés, récompensés et leurs auteurs fêtés au lieu d’être sanctionnés avec toute la rigueur de la loi, ne nous offusquons pas, et lui en premier, des réparties aussi insultantes, violentes que particulièrement outrageantes de certains acteurs de l’opposition déterminés à l’atteindre personnellement.


Défendre le Président Macky Sall et promouvoir son bilan pour battre campagne et se faire élire aux prochaines législatives est une tâche exaltante pour tous les acteurs politiques de son camp, mais il a la responsabilité personnelle de les inviter à une attitude républicaine, parce que toute dérive de leur part l’expose directement et décrédibilise l’institution qu’il incarne.
En conséquence, c’est lui qui subit la réaction des acteurs de l’opposition visés par les attaques de son camp décidément peu inspiré. Les résultats de leurs provocations sont là : jamais un leader politique de la stature de Macky Sall n’a été autant chahuté, tourné en dérision et harcelé au Sénégal.


Il est temps que son camp revienne lucidement aux fondamentaux de la communication politique, dont Alain Testa dit bien fort à propos qu’elle « doit retrouver du sens, de la simplicité et de la sincérité ».


La communication de BBY est un désastre sur tous les plans, et c’est de pire en pire, depuis mars 2021 : le Président Macky Sall prononce un discours pour dire aux jeunes qu’il les a compris, ce sont de vieux ministres qui sont envoyés sur les plateaux télés assurer le SAV, en costumes cravates devant de fringants jeunes de l’opposition qui leur rabattent le caquet !


Jusqu’à son  » je vous ai compris » à la De Gaulle, cette sortie fut un aveu d’échec en convoquant une sombre page de l’histoire de la 5ème République, dont la conséquence sera justement, entre autres cataclysmes sociaux, la chute de De Gaulle.
À la télé, ces ministres auront souffert, terriblement. C’est qu’on ne peut pas vivre sa vie, et celle des autres.


Que le Président Macky Sall sache que le pouvoir et son exercice sont aussi une affaire de génération et que le phénomène Ousmane Sonko qu’il tente de juguler en envoyant au charbon des politiciens totalement amortis et dépassés sera chaque jour renforcé par ses erreurs de casting, et ses stratégies de communication surannées.


Face aux images de foule monstre à la Place de la Nation, on aura ainsi vu BBY tenter de répliquer par une sortie sur tik tok de la malheureuse Adji Sarr, la conférence de presse habituelle de Tata Mimi aux côtés de l’auguste Benoît, en plus de la bagarre entre jeunes apéristes, au siège toujours, suivie d’une déclaration laborieuse du petit Sow ânonnant ses mots avec ses sempiternelles problèmes de prononciation !


Il aura fallu attendre que le Président Macky Sall himself monte au créneau en rattrapant jusqu’à Paname les fringants communicants de Pastef faisant feu de tout bois sur les plateaux TV de l’Hexagone pour équilibrer la bataille de l’opinion, qu’il risque désormais de perdre comme il est en train de perdre l’estime de la rue.


Un seul homme ne peut porter un état, incarner un régime politique et faire face à une opposition aussi déterminée que celle du Sénégal, à moins de verser dans la dictature, en imposant un rapport de forces dont il espère sortir victorieux.
Mars est certes derrière nous, force restera à la loi dit-on, mais quand le jeu politique bascule dans la violence et que la rue dicte sa loi, nous ne sommes plus dans un État de droit. Le Président Macky Sall a encore les atouts, s’il veut changer la donne. Il sait certainement « qu’en politique, il faut guérir les maux, et jamais les venger, » selon la belle formule de Napoléon.


Il lui suffit pour y parvenir de déléguer. Lucidement. À ceux qui sont capables d’assumer les missions qui relèvent de sa responsabilité, et dont chaque résultat a des conséquences sur son régime d’abord, et son avenir politique indubitablement, car aujourd’hui, il est clair que le leadership politique d’Ousmane Sonko est indiscutable, et il est chaque jour renforcé par la faiblesse de la stratégie de communication des leaders du régime, mais plus encore par tous les scandales et polémiques de plusieurs de ses identités remarquables, de plus en plus honnis par l’opinion. Ne nous y trompons pas : « Quand la République a les mains sales, le peuple se tourne vers le despote ».


C’est cela qui explique la popularité grandissante du leader de Pastef. Il est devenu un exutoire de toutes les colères frustrations et ressentiments de toutes les franges de la population à la quête d’une alternative au régime. Veillons à ne pas en faire un martyr cependant !

Cissé Kane NDAO

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