Avenir politique de Barthélémy Dias : Ce que disent le Code pénal et le Code électoral

Barthélémy Dias a-t-il perdu ses droits civiques et politiques ? Pour répondre à cette question, EnQuête a revisité le Code pénal et le Code électoral pour éclairer la lanterne de l’opinion publique, avec le concours de deux avocats.

Le maire socialiste Barthélémy Dias a été condamné hier à 2 ans dont 6 mois de prison pour coups mortels, coups et blessures volontaires et détention illégale d’armes, par le tribunal correctionnel de Dakar. Aussitôt après cette condamnation, le débat sur l’éligibilité du député a pris place, surtout avec l’approche des élections législatives prévues en juillet 2017 et le scrutin présidentiel de 2019. Même si le juge ne s’est pas prononcé sur les droits civiques, sociaux et politiques de Dias-fils. “EnQuête” revient sur les réponses apportés par les juristes sur un cas similaire. Celui de l’ancien directeur général de l’Agence sénégalaise pour l’électrification rurale (Aser), Modibo Diop, qui voulait aller à la conquête de la mairie de Fass-Gueule TapéeColobane, après une condamnation de 3 ans pour détournement de deniers publics.

Ce que dit le Code pénal

Barthélémy Dias déchu ? Pour certains juristes, cette déchéance est une mesure complémentaire. Si l’on se fie aux dispositions de l’article 34 du Code pénal, elle n’est pas obligatoire en matière correctionnelle.
L’article dispose que : “Les tribunaux jugeant en matière correctionnelle pourront dans certains cas interdire en tout ou une partie, l’exercice des droits civiques, civils et de famille de vote, d’éligibilité (…)”. Il ajoute “que lorsque la peine prononcée sera supérieure à cinq ans, l’interdiction définitive de tous les droits devra être prononcée”. Me Assane Dioma Ndiaye précise que “la déchéance est de droit par rapport aux peines infamantes et afflictives, c’est-à-dire aux peines criminelles”. Selon, Me Baba Diop, il y a différents types de sanctions pénales au rang desquels figurent l’amende, l’emprisonnement et les peines complémentaires comme la déchéance.
“C’est une panoplie de sanctions dont le juge dispose pour réparer l’infraction pénale”, dit-il, tout en précisant “qu’il n’y a pas spécifiquement une infraction pour laquelle la déchéance doit être prononcée comme peine complémentaire”. Au contraire, renseigne l’avocat, “le juge apprécie peut-être en fonction du caractère public de l’infraction pour appliquer une peine complémentaire, mais aussi à la personnalité de la personne condamnée”. Quoi qu’il en soit, Me Diop relève qu’il n’y a pas spécifiquement une infraction qui pourrait priver un individu de ses droits civils et politiques.

Ce que dit le Code électoral

Et le Code électoral, dans tout cela. “Il dit que lorsque la personne est condamnée à une peine de six mois ferme pour n’importe quelle infraction, elle est inéligible et le juge n’a pas besoin de le mentionner dans sa décision, de prononcer la déchéance”, éclaire Me Diop. A l’en croire, “la déchéance est acquise ipso facto”. Me Assane Dioma Ndiaye confirme, en relevant que “par rapport à certaines éligibilités à des fonctions ou charge électorale, la loi instaure comme condition de recevabilité le dépôt d’un casier judiciaire”. Et dans ce cas, le concerné
ne pourra pas fournir un casier vierge, parce que la condamnation y figurera. Par conséquent, Me Ndiaye souligne que cette condition est destinée à mettre “un certain filtre par rapport à la moralité des citoyens”.”C’est une question de moralité pour protéger le vote des citoyens qui pourraient ne pas être au courant d’une éventuelle condamnation pour pouvoir apprécier de la moralité du candidat”, insiste-t-il. Pour dire que “la loi ne se soucie pas si la condamnation est infamante ou privative de droits civiques et politiques, mais c’est le principe de la condamnation que la loi répugne en général”. Toutefois, Me Baba Diop déclare que “même si une personne est déchue, cette déchéance n’est pas définitive”. “Dans l’exécution des peines, il y a la phase de réhabilitation”. Celle de plein droit qui suppose que lorsque qu’une personne est condamnée, au bout d’un certain temps, cette peine s’efface et la personne est réhabilitée. Cette réhabilitation judiciaire se fait sur demande de la personne déjà condamnée. Une enquête est effectuée pour savoir si le requérant s’est amendé, en attendant d’être réhabilité. Toujours est-il que, déjà à l’époque, Me Assane Dioma Ndiaye préconisait que le débat sur l’éligibilité soit posé. Dans la mesure où, disait-il, certains se fondent sur leur dispense de privation pour soutenir qu’ils peuvent continuer à se mouvoir dans la vie publique comme s’ils n’ont jamais été condamnés. A noter que la condamnation de Barthélémy Dias n’est pas encore définitive. Ce qui fait qu’il peut bel et bien être investi sur les listes électorales, parce que son casier judiciaire est toujours vierge.

 

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