APRES L’INTERDICTION OFFICIELLE DE L’ORPAILLAGE : La Falémé à l’agonie, bombe écologique et péril sécuritaire

La Falémé est un microcosme des défis environnementaux et sécuritaires posés par l’orpaillage artisanal. Les impacts écologiques sont dévastateurs, affectant la qualité de l’eau, la biodiversité et les habitats naturels. Les enjeux socio-économiques, incluant l’exploitation des femmes et des enfants et les conflits d’usage des terres, exacerbent la situation. Deux rapports scientifiques viennent de préciser les enjeux écologiques et sécuritaires dans cette zone à cheval entre le Sénégal et le Mali.

Le 18 juillet dernier, le gouvernement a décidé d’interdire les activités minières et en suspendant l’octroi de permis d’exploitation dans la région du fleuve Falémé.
Le communiqué publié à l’issue du Conseil des ministres avait annoncé l’examen et l’adoption du projet de décret portant interdiction des activités minières et d’octroi de permis d’exploitation dans la zone du fleuve Falémé.
Cette décision était attendue eu égard à la convergence des travaux scientifiques sur le dossier de ce cours d’eau stratégique car constituant le quart de l’apport en eau du principal fleuve du pays, le Sénégal, dont un lac alluvial, celui de Guiers, est la principale source d’approvisionnement de Dakar.

La Falémé, principal affluent du fleuve Sénégal, prend sa source dans les massifs du Fouta-Djallon en Guinée et se jette sur le fleuve Sénégal à Aroundou, dans la commune de Ballou. Ce cours d’eau constitue, pour l’essentiel, la frontalière naturelle entre le Sénégal et le Mali, plus précisément entre le département sénégalais de Saraya (région de Kédougou) et le Cercle malien de Kéniéba d’une part, et d’autre part entre le département de Bakel (région de Tambacounda) et le Cercle de Kayes.

Du côté de la rive sénégalaise, la Falémé est longue de six (06) communes situées dans le département de Bakel, à savoir : Ballou, Bellé, Gathiary, Kidira, Madina Foulbé et Sadatou. Cette zone transfrontalière couvre au total une superficie d’environ 9590 km² dont 6250,7 km² au Sénégal et près de 5881 km² au Mali.

L’explosion de l’activité de l’exploitation aurifère a bouleversé la vie des riverains et a engendré de graves pollutions environnementales. Deux études récentes (Avsf-Grdr, 2023 ; Sofreco-Omvs, 2024), ont permis d’en évaluer l’ampleur, d’identifier les sources de conflits qui en résultent et d’envisager des mesures correctives. La première étude a été initiée conjointement par le groupe de solidarité internationale Migration-Citoyenneté-Développement (Grdr) et Agronomes et Vétérinaires Sans Frontières (AVSF), deux ONG de droit français qui interviennent au Sénégal depuis plusieurs années, grâce à l’appui financier de l’Agence française de développement.

Depuis quelques années, que la rivière Falémé soit au cœur d’une crise écologique et sécuritaire n’est plus la question. Mais comment l’endiguer ? La ruée vers l’or dans cette région a transformé ce cours d’eau vital (25% du fleuve Sénégal) en un foyer de pollution intense et de conflits socio-économiques. Les deux rapports mettent en lumière les conséquences dévastatrices de l’orpaillage artisanal sur l’écosystème de la Falémé et les enjeux sécuritaires qu’il ravive. Les rejets miniers contiennent des métaux lourds extrêmement toxiques, notamment le mercure, le cyanure, le chrome, l’arsenic, le plomb et le cadmium.

MERCURE, CYANURE, ARSENIC, PLOMB…..
Ces substances se retrouvent dans les écosystèmes locaux, y compris dans l’eau de puits, posant un grave danger pour la santé des populations riveraines et la biodiversité. Le mercure, utilisé dans le processus d’amalgamation de l’or, est particulièrement préoccupant en raison de sa capacité à se bio-accumuler dans les chaînes alimentaires, affectant ainsi à long terme la faune aquatique et terrestre.
« Le dragage des rivières, en plus de déstabiliser les berges, détruit les habitats des poissons en obstruant leurs branchies avec des particules d’argile. Cette destruction entraîne la mort de nombreux poissons, perturbant les chaînes alimentaires locales et réduisant la biodiversité aquatique.

Par ailleurs, la faune sauvage perd ses habitats et ses corridors de migration, forçant les éleveurs à modifier leurs circuits de transhumance et augmentant les conflits d’usage des terres », souligne le rapport 2023 de Avsf-Grdr. Les sites miniers deviennent ainsi des arènes de conflit et de négociation entre divers acteurs économiques, sociaux et politiques, nécessitant une régulation stricte pour minimiser les impacts négatifs.

Sur un autre registre, l’orpaillage artisanal a provoqué une déforestation massive le long de la Falémé, détruisant le paysage et la faune locale. Les deux rapports concordent avec plusieurs constats : les orpailleurs déboisent non seulement pour créer de l’espace pour l’exploitation mais aussi pour obtenir du bois nécessaire au soutènement des puits et aux besoins domestiques. « Ce déboisement entraine la disparition du tapis herbacé, mettant en péril les habitats naturels des espèces locales. L’utilisation de dragues pour l’extraction de l’or a considérablement augmenté la turbidité de l’eau. Ces machines remuent des argiles riches en métaux lourds, comme le mercure, le cyanure et le plomb, menaçant la qualité de l’eau. Les orpailleurs utilisent en moyenne 500 litres d’eau par jour, contribuant à une utilisation anarchique de cette ressource précieuse. Les hydrocarbures déversés par les motopompes ajoutent une couche de pollution chimique qui compromet encore davantage la qualité de l’eau de la Falémé », y lit-on.

Les rejets miniers contiennent des métaux lourds extrêmement toxiques qui se retrouvent dans les écosystèmes locaux, y compris dans l’eau de puits, posant un grave danger pour la santé des populations riveraines et la biodiversité. Le mercure, utilisé dans le processus d’amalgamation de l’or, est particulièrement préoccupant en raison de sa capacité à se bio-accumuler dans les chaînes alimentaires, affectant ainsi à long terme la faune aquatique et terrestre. « Le dragage des rivières, en plus de déstabiliser les berges, détruit les habitats des poissons en obstruant leurs branchies avec des particules d’argile. Cette destruction entraîne la mort de nombreux poissons, perturbant les chaînes alimentaires locales et réduisant la biodiversité aquatique. Par ailleurs, la faune sauvage perd ses habitats et ses corridors de migration, forçant les éleveurs à modifier leurs circuits de transhumance et augmentant les conflits d’usage des terres », souligne le rapport 2023 de Avsf-Grdr.

Les sites miniers deviennent ainsi des arènes de conflit et de négociation entre divers acteurs économiques, sociaux et politiques, nécessitant une régulation stricte pour minimiser les impacts négatifs.


Samboudian KAMARA

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