Les agents de santé brandissent la menace de la rétention d’informations sanitaires

« À partir du 31 août, nous allons commencer la rétention d’informations sanitaires sur l’ensemble du territoire national ». C’est le mot d’ordre décrété par le Cadre unitaire des syndicats de la santé pour la justice sociale (CUSS/JS). Entouré de ses camarades, Cheikh Seck, physiothérapeute à l’hôpital Idrissa Pouye, ex-CTO et coordonnateur du CUSS/JS a donné le ton bien avant le départ de leur marche de l’École nationale de développement sanitaire et social (ENDSS) au ministère de la Santé, ce mardi, 4 août.

 

« En 2018, on avait déjà déposé une plateforme et un préavis de grève qui devaient faire l’objet de négociations et de discussions avec le gouvernement. Notre Gouvernement laisse la situation pourrir avant d’appeler les gens à des discussions mais quand les discussions ont commencé, ça n’a pas permis de régler la situation. Ces points de revendications nous ont poussés à dérouler un premier et deuxième plan d’actions. D’ailleurs, le second devait se dérouler les 10, 11 et 12 mars derniers mais le 2, il y avait l’apparition du premier cas de coronavirus. Nous avions décidé de façon souveraine de surseoir à toute activité syndicale en nous impliquant directement dans la lutte contre cette maladie », rembobine le Secrétaire général du Syndicat démocratique des travailleurs de la santé et du secteur social affilié à la CNTS/FC.

 

« Ceux qui ne sont pas directement impliqués davantage pris en compte »

Avant de hausser le ton : « Ce que nous avons constaté, c’est que depuis cette date, beaucoup de moyens ont été mobilisés dans le cadre du plan de résilience nationale. Ceux qui ne sont pas directement impliqués sont même plus pris en compte que nous. Les hôteliers, je ne dis pas qu’ils ne doivent pas en bénéficier, ont reçu 50 milliards FCFA. Près de 600 milliards ont été octroyés aux entreprises. La préservation des emplois est une bonne chose mais ce qu’on a donné, même les 64 milliards au niveau de la Santé, pratiquement ce n’est pas allé au niveau du personnel. Nous, agents de santé, nous avons nos revendications depuis plus de 10 ans et on ne parle pas de nous. Cela veut dire qu’on ne nous respecte pas. Et quand on ne vous respecte pas, vous devez apprendre à vous faire respecter (en montrant) à l’autorité d’abord que vous existez. »

 

Leurs points de revendication concernent, liste le syndicaliste, « les plans de carrière des agents où des personnes ont été formées dans leur cadre, et ont obtenu des diplômes de grande valeur académique dans les plus grandes universités et écoles de formation en matière de santé. Depuis 2009, des réformes ont été lancées, et ces gens-là devraient être intégrés, certains, dans la hiérarchie A. Aujourd’hui, certains même sont partis à la retraite, et n’ont pu bénéficier de ces avances statutaires. »

 

« Les agents de santé sont les plus mal payés »

L’autre élément, ajoute Seck, concerne le régime indemnitaire : « C’est l’État sénégalais qui avait demandé à ce qu’on fasse l’audit de la Fonction publique en ce qui concerne le traitement salarial. Les conclusions avaient montré que les agents de santé étaient les plus mal payés, et qu’il fallait corriger. Nous n’avons pas un seul franc en termes (ni) d’indemnités de logement dans le secteur de la santé (ni) d’indemnités de risque. En dehors du salaire indiciaire, il n’y a rien qui nous permette de gagner aisément notre vie. »

 

A l’en croire, « il n’y a que huit mille agents de santé dans la Fonction publique. En 1ère année de recrutement de formation d’infirmiers d’État, à l’ENDSS, il n’y en a que cinq mille. Plus grave encore, pour opérer des malades, vous avez besoin de techniciens, anesthésistes, réanimateurs. Depuis trois ans, on n’a pas ouvert le concours. Pour que le médecin puisse avoir des résultats après sémiologie, il faut impérativement des résultats biologiques qui peuvent lui dire tel ou tel microbe est responsable de la maladie. Ces biologistes-là n’ont pas été formés depuis trois ans. Aujourd’hui, il y a plus de 400 malades qui attendent d’être dialysés parce qu’ils n’ont pas de lit. Les techniciens en néphrologie, chargés de faire ces dialyses, n’ont pas été formés depuis trois ans car on n’a pas ouvert le concours. C’est valable en ophtalmo, en médecine physique rééducation fonctionnelle où les gens ont en charge les victimes d’AVC, (entre autres). Non seulement on ne forme pas, mais chaque année on continue, pour ceux qui ont des diplômes, à les contractualiser. Ce qui n’est pas normal. Le système de santé est en train d’enrichir une bande de nomenclature parce que la santé est un secteur où 80% du budget est alimenté par des partenaires au développement. »

 

Devant le ministère, les manifestants ont buté sur les barrières érigées par les forces de l’ordre. « Nous voulons la présence du ministre », ont-ils scandé, en vain.

 

      Emedia

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