Le philosophe Souleymane Bachir Diagne sur le coronavirus : ‘’l’homme vaincra par sa science et sa raison’’

Auteur de nombreux travaux d’épistémologie critique sur la pensée et la logique inhérente aux mathématiques, en particulier l’algèbre (« Boole, l’oiseau de nuit en plein jour », 1998) et aux pratiques philosophiques dans le monde musulman (« Comment philosopher en Islam ? », 2008), Souleymane Bachir Diagne présente le profil idéal pour, si besoin en est, « réconcilier » science et foi dans l’analyse de la pandémie de coronavirus. Depuis New York où il est en confinement, le philosophe sénégalais nous livre sa lecture de la crise.

 

Depuis New-York où il est confiné, le philosophe Souleymane Bachir Diagne a eu un entretien avec le quotidien national « Le Soleil » sur le coronavirus. Selon lui, ‘’l’homme vaincra par sa science et sa raison’’ face à cette pandémie qui fait des ravages.

De l’avis du Philosophe, la victoire sur le coronavirus sera remportée lorsque l’humanité disposera d’un médicament dont il sera empiriquement établi qu’il est efficace et surtout d’un vaccin qui protègera tout le monde. Et ce sont des hommes et femmes de science que nous attendons l’un et l’autre. Il est heureux que la foi en la science et en la raison s’affirme ainsi en ces temps où l’obscurantisme prospère. Chez les fanatiques de tous bords bien sûr, mais aussi, par exemple, chez ceux qui considèrent que le discours des scientifiques sur le changement climatique n’est que cela justement : un discours comme un autre que valent d’autres opinions. Il est également heureux que les hommes et femmes de science travaillent à vaincre la pandémie dans une collaboration internationale qui dit la grandeur de l’humain. On peut faire le constat que cette collaboration est réelle et que, même s’ils n’ont pas disparu, les égoïsmes de laboratoires concurrents, de nations en compétition s’effacent devant l’urgence et devant le sens qui aujourd’hui habite toute l’humanité de son unité et de sa fragilité. C’est une affaire de temps mais l’humain vaincra par sa science et sa raison. Insha’Allah !

Souleymane Bachir Diagne pense à l’après corona. Même si pour lui, « il est encore difficile qu’en l’espace de juste quelques semaines, nous sommes passés du monde que nous connaissions et où les amis se donnent l’accolade à cet univers cauchemardesque où le mieux à faire les uns pour les autres est de nous écarter les uns des autres. C’est un basculement sans précédent que nous vivons ».
Appelant à tirer les leçons de la crise, il estime que « le monde d’après covid-19 devra être différent, ne serait-ce que parce que toute crise comporte des leçons dont il faut savoir tenir compte. (…) Nous assistons à la lutte de tous contre tous pour acheter les mêmes produits auprès des mêmes vendeurs avec comme inévitable conséquence des renchérissements insensés sur les prix des masques, des respirateurs, maintenant des tests ».
Dans cet échange, Bachir Diagne invite à penser un autre modèle… Ce qui selon lui constitue une alternative qui mette en avant la santé plutôt que la rentabilité, et de manière générale, la question sociale et la solidarité plutôt que le profit et l’égoïsme, qui tienne compte de cette vulnérabilité qui est notre condition et de l’urgence climatique dans laquelle nous vivons, c’est la direction dans laquelle il faut engager la réflexion sur « les grands bouleversements politico-idéologiques » que cette pandémie appelle.

Le philosophe s’intéresse en même temps à la situation dans son pays. « Je suis à l’écoute de ce qui se passe chez nous au Sénégal, souligne-t-il. En étant fier de l’esprit dans lequel notre pays fait face, de notre État, de notre classe politique, de la manière dont nos professionnels de la santé et nos excellents scientifiques de l’Institut Pasteur montent au créneau. »

Souleymane Bachir Diagne n’a pas manqué de lancer une pique à ceux qui affirment que l’Afrique risque d’enregistrer des millions de morts dus au Covid-19 : « Si nous manifestons la discipline et l’esprit de responsabilité que la situation exige, nous ferons mentir les Cassandres qui nous prédisent le pire… »

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.