Entretien avec Aliou Cissé : le coach de l’équipe nationale se confie

Quatre jours après le sacre des Lions, et les festivités intenses qui ont suivi, Aliou Cissé a accordé un entretien exclusif au groupe E-Media. De sa Casamance natale, traversée par un regain de crise, à son avenir en sélection, en passant par sa relation particulière avec ses anciens coéquipiers, Aliou Cissé n’a éludé aucun thème et a livré ses vérités, parfois avec émotion.

Coach, près de 7 ans après votre arrivée sur le banc de touche de l’équipe nationale A, on atteint enfin l’aboutissement. Comment s’est construit cette première victoire historique ?

Comme vous le dites, cela fait 7 ans que nous sommes à la tête de cette équipe nationale et je peux vous dire que c’est juste un processus qui s’est mis en place de 2015 jusqu’à aujourd’hui. Nous avons participé à trois Can. La première était au Gabon, où on a été éliminé en quart de finale. Mais elle nous a permis d’apprendre beaucoup de choses. Et puis, fort de cela, on est arrivés en 2019 où je pense qu’on était meilleurs en 2017. Malheureusement, l’Algérie nous a stoppés en faisant un parcours exceptionnel. Et avec le recul, je pense que c’était la meilleure équipe de ce tournoi, mais nous n’avons jamais abdiqué, on a continué à travailler. En 2022, on est arrivés avec beaucoup de certitudes, même si le début de compétition a été assez difficile. Beaucoup de joueurs ont manqué les premiers matchs, mais nous n’avons jamais douté de nous. On a continué à travailler et aujourd’hui, on a récolté le fruit de tant d’années de sacrifices, d’abnégation, de détermination. On est arrivé à hisser cette équipe-là, sur le toit de l’Afrique. Nous sommes très fiers.

De 2015 à aujourd’hui, cette équipe a progressé en changeant bien sûr de joueurs. On a pensé à constituer petit à petit une équipe pour, justement, dans la durée, pouvoir gagner cette Can-là. Comme je l’ai dit, c’est de la chance que les dirigeants m’ont donnée de pouvoir mettre en place notre projet sportif, tout en sachant qu’il y avait beaucoup de choses à changer en termes de mentalité, au sein de la tanière et cela ne pouvait pas se faire du jour au lendemain. Il fallait du temps, et ce temps-là, on l’a eu. C’est ce qui nous a permis de gagner. Je dirais que tout a été important, en réalité, de 2015 à aujourd’hui. Si j’étais resté seulement au bout de deux ans, je pense qu’on n’arriverait pas là où nous sommes, parce que j’ai pu avoir la possibilité de pouvoir travailler sur le long terme.

Depuis le 6 février 2022, après le tir de Sadio Mané, en passant par votre passage au Palais de la République, comment vous vous sentez jusqu’à ce matin (hier) ?

Jusqu’à l’heure où je vous parle, franchement je ne réalise pas encore tout ce qui a pu se passer parce qu’en termes d’émotions, on est montés très, très haut. La vérité est qu’il ne nous faudra pas 4 jours pour redescendre, pourtant on sait que rapidement, il va falloir redescendre parce qu’il y a des échéances qui arrivent.

Le discours même du coach a changé. C’était quoi exactement ? Vous avez senti arrivé ce sacre ?

Oui, on l’a senti, même si on a eu un début difficile et cela s’explique. Je n’ai pas besoin de revenir sur les raisons qui font que ce début a été difficile, mais honnêtement, la vérité c’est que nous n’avons jamais douté. On est toujours restés sereins. Nos objectifs on les connaissait. En arrivant à Bafoussam, l’objectif c’était de terminer premier de la poule et c’est ce qu’on a fait. Cela nous a permis, dans notre planification, de rester encore 15 jours et de jouer notre quart de finale en altitude. Car cet aspect-là a été très important. Quand vous regardez les matchs du Sénégal en quart de finale ou en demi-finale, vous sentez que cette équipe est montée en régime. C’est parce que c’est l’altitude qui faisait cela aussi. C’est le fait qu’on est resté à Bafoussam sans pour autant trop bouger. Notre plan a été réfléchi, mais pour qu’on puisse le réaliser, il fallait qu’on finisse premier. Maintenant, je peux comprendre que certains s’attendaient à ce qu’on finisse avec 9 points dans notre poule. Nous aussi, c’est ce qu’on voulait, finir avec 9 points, prendre les 3 points contre toutes les équipes contre qui on a eu à jouer, malheureusement, cela n’a pas été le cas. Ça a été plutôt âprement disputé et c’étaient des matchs difficiles et je pouvais comprendre que dans ces périodes-là, que le monde sportif, l’opinion, se dit que le Sénégal n’est plus favori. Mais au sein de notre groupe, à l’intérieur, nous avions cette confiance-là. On est des compétiteurs et ce qui est important pour nous, c’était de sortir premier et on a fini premier.

« Le monde entier attend le Sénégal à la Coupe du monde »

Avez-vous le sentiment d’être un incompris avec toutes les critiques qu’il y a contre vous ?

Non. Je pense qu’avec l’accueil que l’on nous a réservé, le public est collé à cette équipe-là. Vous les journalistes, vous avez parfois, une façon de voir les choses et vous ne connaissez pas tout ce qui est à l’intérieur. Donc, quelqu’un qui ne peut pas savoir tout ce qui est à l’intérieur et qui ne vit pas les choses de l’intérieur, a toujours son jugement un peu différent de la réalité. Et moi, à plusieurs fois je lis la presse et j’écoute les débats. Et, par moment, je me dis : ‘’Mais on est vraiment en décalage avec la réalité, avec ce que nous vivons dans cette tanière.’’ Dans cette équipe-là, il y a des garçons ambitieux qui ont envie de travailler. Comme vous le dites dans le jeu, on peut toujours s’améliorer. Je peux comprendre aussi que les gens quand ils voient aujourd’hui Edouard Mendy, Nampalys Mendy et qu’ils voient le pedigree que nous avons, qu’ils veuillent voir le Sénégal jouer comme le Barça ou Manchester City. Bon, ce sont les supporters qui sont comme ça. Souvent, ils regardent le championnat anglais ou espagnol, donc tout ce qu’ils voient là-bas, ils veulent le voir ici. Ils se disent qu’en sélection, il y a des gens qui jouent comme ça, mais ce n’est pas toujours cela. Nous sommes en sélection, nous ne sommes pas en club. Si aujourd’hui cette équipe vous me la donnez pendant toute une saison, forcément, elle jouera autrement, parce qu’on aura le temps de répéter les choses et de mettre en place les automatismes. Faisons la différence entre les matchs de championnat et les matchs de Can, où l’objectif c’est de se qualifier. Parfois, vous tombez sur des matchs difficiles, mais je crois que ce groupe-là, en termes de mental et d’état d’esprit, a passé un cap. Aujourd’hui, on ne peut plus faire une Can sans le Sénégal.

Après l’euphorie, est-ce que c’est aisé d’avoir à rencontrer le même adversaire, l’Egypte, après l’avoir battue en finale, et surtout au Caire ?

Nous sommes conscients que dans un mois, il y aura encore une autre compétition. Et que le monde entier attend le Sénégal à la Coupe du monde. Aujourd’hui une Coupe du monde sans le Sénégal, aura une saveur un petit peu différente. Nous sommes conscients de ça ; les joueurs aussi. Aujourd’hui, ils savent ce qu’ils veulent pour eux, pour le pays. On est juste en train de profiter de ces beaux moments-là. Parce que nous avons travaillé pour arriver justement à ces instants-là. Mais à partir de la semaine prochaine, je serai déjà en France pour commencer à superviser d’autres joueurs et préparer cette double confrontation qui est très importante. La Can, c’est très bien, la coupe nous l’avons gagnée, mais en réalité, nous avons aussi d’autres ambitions, comme aller à la Coupe du monde et exister lors de ces échéances mondiales.

Et justement, cette coupe du monde, est-ce qu’aujourd’hui il n’y a pas une autre pression. Surtout après cet hommage que vous avez reçu du peuple sénégalais qui va être encore beaucoup plus exigeant ?

Oui, l’exigence est toujours là. Je suis exigeant vis-à-vis de moi-même et des joueurs. On est dans le sport de haut niveau, donc, celui qu’on a applaudi aujourd’hui, demain on peut l’insulter. Et c’est ça la réalité du football, nous en sommes conscients. C’est pour cela que je parle toujours d’humilité parce que je sais ce que le peuple a fait aujourd’hui, hier et avant-hier, pour nous montrer vraiment l’amour et la reconnaissance qu’il avait pour cette équipe-là. Ces gens qui sont venus nous accueillir en 2022 sont exigeants parce qu’ils croient en nous. Mais ils savent aussi nous encourager quand on perd.

C’est quoi votre relation avec ces cadres de l’équipe : Sadio Mané, Cheikhou Kouyaté, Idrissa Gana Guèye, Kalidou Koulibaly ? Jouent-ils un rôle d’adjoint ?

Je ne dirais pas un rôle d’adjoint parce qu’ils ne sont pas des techniciens, qu’on se dise la vérité. Mes adjoints, tout le monde les connaît. Mais ce que je crois, c’est que le staff technique, sans l’implication des joueurs, ce n’est pas possible. C’est un rôle qui est difficile à prendre, naturellement tout le monde n’est pas leader. Donc, si vous voulez, petit à petit nous préparons aussi des leaders. Nous préparons aujourd’hui des garçons, ils peuvent être des relais au sein de l’équipe. C’est l’occasion pour moi de féliciter cette génération-là. Quand je dis féliciter cette génération, c’est surtout les joueurs qui n’ont pas eu beaucoup de temps de jeu. Vous avez vu l’image de Moustapha Name, c’est un garçon exceptionnel qui n’a pas du tout joué, mais il fallait le voir à l’entraînement. Les Pape Abou Cissé, Bamba Dieng, Baba Thiam, Diao Baldé Keita ont un comportement, une attitude extraordinaire. C’est grâce à ces garçons-là qu’on est arrivé là où on est aujourd’hui. Dans cette équipe nationale, à un moment donné, quand je suis arrivé, j’ai vu des garçons, quand on leur demandait d’aller s’échauffer, ils ne le faisaient pas. C’est ça la réalité et c’est cet esprit nouveau dont je suis en train de parler.

A quelles têtes pensez-vous, quand vous parlez de joueurs à intégrer. Est-ce que Boubacar Camara de l’Olympique de Marseille, est dans votre petit carnet ou d’autres qui toquent à la porte ?

Forcément, quand vous voyez le niveau où l’équipe est, je peux comprendre que d’autres garçons aient envie d’intégrer l’équipe nationale. Mais il ne faut pas oublier que ceux qui sont là ont fait une grosse performance. Cette équipe ne doit pas être fermée, nous voulons nous améliorer et apporter du sang neuf. Nous voulons toujours créer de la concurrence. Il y a une dynamique et une ossature qui sont là. Il ne s’agit pas de prendre pour prendre, ni d’aller chercher des joueurs parce qu’on veut avoir des joueurs. Il faut qu’on aille chercher des joueurs capables et là où nous sommes en manque. Les qualités de Boubacar Camara ou Sofiane Diop ne sont plus à démontrer. Ce sont des garçons qui sont amenés à intégrer cette équipe. Mais il ne faut pas non plus faire n’importe quoi. Il ne s’agit pas de faire une révolution, mais de continuer à évoluer avec ce que nous avons toujours fait.

« Mon avenir ne dépend pas que de moi… »

On vous reproche, par moments, de ne pas trop vous ouvrir au football local, qu’est-ce qui manque à ces joueurs du championnat local pour pouvoir franchir l’étape et intégrer en plus grand nombre cette sélection ?

Je n’ai rien contre le football local. Aujourd’hui, Alioune Badara Faty est là, Moutarou Baldé était sur la liste d’attente. Ce football local est très important et le fait aussi que le Sénégal soit le champion d’Afrique, ça donne encore beaucoup plus de publicité et de visibilité au football local. Ce que je veux est qu’on continue à travailler. Chez moi, il n’y a pas de discrimination, je regarde les meilleurs profils, s’il y en a au Sénégal, je le prendrai. Je n’ai rien contre le football local, au contraire, je me considère comme un local, même si certains pensent que je ne le suis pas et je ne peux pas rejeter ce que je suis. Je pense que les clubs qui sont là, doivent continuer à se promouvoir. Je suis persuadé que d’autres joueurs vont intégrer cette équipe comme Alioune Badara Faty, comme Mountarou Baldé. L’équipe nationale n’est fermée à aucun joueur. J’aimerais qu’on taise ce débat-là et qu’on essaye de penser à l’intérêt national du Sénégal.

Un avenir est entre les mains de Dieu, dixit Aliou Cissé durant toute cette Can. Vous n’avez jamais voulu parler d’avenir, est-ce le moment de parler de l’avenir d’Aliou Cissé avec l’équipe nationale ?

Écoutez, l’avenir ce n’est pas que moi. Je suis salarié dans une structure qui est la Fédération sénégalaise de football et le ministère des Sports. L’amour que j’ai pour mon pays, tout le monde le connaît. Il y a des choses qui dépendent de moi et celles qui ne dépendent pas de moi. Nous discuterons de tout ça avec la Fédération et nous verrons en tous cas la ligne directrice à adopter.

Mais dans la perspective de continuer encore ?

Mais ce n’est pas moi qui propose. On en discutera, je suis bien ici, je fais bien mon boulot. Demain, on peut me dire de partir, mais je partirai aussi. Donc, ce n’est pas le problème. Les choses ne dépendent pas de moi.

 » Je pleure tous les jours »

Allez-vous demander une revalorisation salariale par exemple. On sait que vous êtes le coach le moins bien payé, pour ceux qui sont sur le classement Fifa ?

Si tu veux savoir la vérité, ce n’est pas l’argent qui m’a motivé à venir ici. Cela me fait toujours rire quand les gens parlent comme si je suis un cheveu qui vient de tomber dans la soupe. J’ai une histoire avec cette équipe.

Contrairement à ce que beaucoup de gens pensent, je ne suis pas venu et d’un coup, on m’a donné l’équipe. J’ai travaillé ici pendant 4 ans sans que les gens le sachent. J’étais là à Toubab Dialaw. J’étais entraîneur de l’équipe olympique. Après la génération de 2012, je suis resté ici. Les Loum Ndiaye et autres, c’est avec moi qu’ils ont eu leur première sélection. Pape Abdou Cissé, c’est moi qui lui ai donné sa première sélection. Ibrahima Seck et Moussa Wagué pareils. Cela veut dire que toute cette génération, je l’avais déjà. Donc, aujourd’hui, si je suis avec l’équipe nationale A, c’est à travers un long processus qui a été mis en place. L’argent ne m’a jamais motivé. Le football, c’est ma passion. J’ai toujours donné le maximum de moi-même. Et le football me l’a rendu. Si c’est l’argent qui me motivait, j’aurais dû partir depuis longtemps. J’avais d’autres propositions où je pourrais gagner beaucoup plus. Je vais vous dire ce qui m’a motivé. Il y a eu une finale en 2002 où j’ai loupé un penalty. Je l’avais dit à Salif Diao qui était passé dans ma chambre pour me consoler. Je lui ai dit écoute : « Salif, cette coupe-là, je l’amènerai. Que je sois joueur, dirigeant ou entraîneur, mais je l’amènerai au peuple sénégalais. » Alors, quoi que l’on puisse dire avant, j’avais cet objectif d’amener cette coupe au Sénégal, il n’y a rien qui pouvait me déstabiliser sur mon chemin. C’était une affaire personnelle. Ma motivation était que le drapeau du Sénégal flotte partout. C’est un problème de nation, de drapeau, de voir mon pays aller de l’avant. Mais pas un problème d’argent. Et je veux que la jeunesse le comprenne. Ce qui s’est passé le 6 février montre la détermination, l’abnégation des jeunes footballeurs.

Vous arrive-t-il d’être seul et de pleurer ?

Moi je pleure tous les jours. Les gens ne le savent pas, mais je suis très émotif. Il y a des choses qui me font mal. Tout à l’heure, tu parlais d’incompréhensions et autres, bien sûr qu’il y a des choses qui me font mal.

« C’est important que les jeunes soient des combattants, des entrepreneurs, qu’ils ne se découragent pas. C’est important que les jeunes sachent se fixer des objectifs »

Comme quoi sous votre magistère ?

Il n’y a pas que sous mon magistère. Je ne peux pas dire que ceci ou cela m’a fait mal. Mais nous sommes des humains. On vit parfois des moments d’émotion. Il y a des moments où l’on n’est pas bien et on pleure. Des moments où l’on est bien, mais ça ne dure pas longtemps. Moi, c’est cette force que j’ai. Je pleure aujourd’hui et le lendemain je pars beaucoup plus costaud, beaucoup plus fort, parce que je suis un combattant, parce que, j’ai des objectifs, parce qu’il y a l’attente des supporters. Et en réalité, je ne me suis jamais senti seul. Après les incompréhensions, ça arrive, peut être sur une parole que je n’ai pas bien dite, sur une phrase que je n’ai pas bien sortie, quelqu’un le capte et tout de suite, il me prend comme quelqu’un d’arrogant ou quelqu’un d’irrespectueux. Mais les gens qui me connaissent savent que je suis quelqu’un de très respectueux, très bien éduqué. Mais aussi je suis quelqu’un d’ambitieux et mentalement, très fort. Quand je veux atteindre un objectif, je ferai tout pour l’atteindre.

Et c’est là que j’appelle la jeunesse sénégalaise. C’est important que les jeunes soient des combattants, des entrepreneurs, qu’ils ne se découragent pas. C’est important que les jeunes sachent se fixer des objectifs. Il y aura toujours des gens qui viendront vous décourager, mais il faudrait tout simplement qu’ils prennent conscience de leur responsabilité. Cette coupe montre à la jeunesse sénégalaise que tout est possible. Il faut simplement se battre. Et on ne peut pas tout attendre de nos dirigeants. À un moment donné, c’est à nous de prendre notre destin en main.

Vous êtes un fils de la Casamance. Aujourd’hui, il y a une situation assez difficile qui s’est passée pendant que vous étiez en mission à la Can. Quel est le message que vous lancez à l’endroit de tous ceux qui tournent autour de cet événement ?

Je suis Sénégalais né en Casamance. Malheureusement, depuis 40 ans, il y a une situation très compliquée. Je vis très mal cette situation. Je sais c’est quoi se lever le matin et entendre des rafales de Kalachnikov. Aujourd’hui, il y a des villages ravagés par cette situation. Vous y allez, vous ne verrez personne. Cela veut dire que les gens ont quitté pour fuir l’insécurité. Quand vous êtes un enfant et que vous vivez cela, c’est difficile. Et moi j’ai grandi dans cet univers. C’est une situation compliquée. 40 ans de conflit qui mine l’économie de la région alors qu’elle a d’énormes potentialités. Dans l’équipe nationale, il y a de jeunes Casaçais. C’est pourquoi cette coupe, j’ai envie de la ramener dans la région pour dire à nos oncles, nos pères, nos parents, que la paix doit revenir parce que les enfants de mon pays ont besoin de cette paix.

On a vu pendant tout votre parcours, certains de vos anciens coéquipiers de la génération 2002 ont été par moment très critiques à votre endroit. Comment avez-vous vécu cela ?

Cela ne m’a jamais fait mal, ce sont mes frères d’armes. A un moment donné, j’ai vécu plus avec ces gens qu’avec ma propre famille. Et cela, rien ne peut le remplacer. 20 ans après, s’il y a eu un malentendu, on l’a réglé.

On a vu cette image avec Khalidou Fadiga, Tony Silva, El hadj Diouf, après le sacre. Est-ce que cela fait partie du « on a réglé le problème » ?

Vous savez, la génération 2002 est une génération spéciale. Elle a donné tellement de bonheur et de satisfaction au pays qu’on ne peut pas l’oublier. Dieu a fait que ce sont les membres de cette génération qui sont à la tête de l’équipe nationale du Sénégal. Cela veut dire que l’histoire continue. Aliou Cissé qui gagne, c’est la génération 2002 qui gagne. Maintenant, il peut y avoir des malentendus, mais Fadiga ou Diouf, ne peuvent jamais être mes ennemis, ce sont mes frères. Diouf n’a jamais fait une sortie pour critiquer la génération 2002. La dernière fois, on m’avait posé la question, j’avais dit que je ne répondrai pas à la génération 2002 parce qu’on se connaît.

Donc, ils ne peuvent dire quelque chose qui puisse me faire mal, au contraire. J’ai toujours ouvert la porte. Maintenant quiconque veut venir, est le bienvenu. Celui qui ne veut pas venir, nous allons continuer. Et quel que soit le problème, si nous nous asseyons autour d’une table, nous allons tomber d’accord. On a montré qu’ensemble on sera toujours devant, c’est ce que je voudrais, que cette coupe-là apporte, de la sérénité. Amdy Moustapha Faye n’est pas mon ennemi. Henri Camara non plus, lui, c’est mon boy. Moi je ne comprends pas ses sorties parce qu’Henri, je fais partie des gens qui l’ont couvé, qui l’ont aidé au sein de cette équipe nationale et il le sait. Vous ne m’avez jamais entendu sortir et dire quelque chose de mal de la génération de 2002.

Maintenant, il y aura toujours des divergences. En réalité, ce qui est important, c’est que le drapeau du Sénégal flotte et surtout qu’on se respecte dans ce pays.

« C’est surtout ma mère qui me manque parce qu’elle n’est pas avec moi »

C’est quand la dernière fois que Aliou Cissé a eu des vacances avec sa famille ?

(Rires). Il y a longtemps que je n’ai pas pris de vacances. Peut-être 8 ans, 9 ans. Depuis que je suis à la tête de cette équipe nationale, dans cette direction technique. C’est surtout ma mère qui me manque parce qu’elle n’est pas avec moi. D’ailleurs, je vais aller la voir. J’en profite pour lui faire un énorme bisou parce que tout ça, c’est elle. C’est vrai que mes enfants, je les vois de temps en temps, ma femme aussi elle vient, repart.

Et El Tactico et à quand vous allez couper les rastas ?

(Eclats de rire). El Tacitico. Non les gens ont déjà acheté les ciseaux, je pense que dans la semaine normalement ils vont les couper.


Entretien réalisé par Babacar Ndaw FAYE & Saikou SEYDI (Emedia)

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