Défis et opportunités de l’Agriculture au Sénégal : la vallée du fleuve, un grenier ouest Africain

Au Sénégal, l’agriculture a toujours été au cœur du développement. Depuis plusieurs années, les différents régimes successifs du pays ont consacré d’importants programmes de relance de la filière agricole (le Plan REVA, la Grande Offensive Agricole pour la Nourriture et l’Abondance –GOANA, le Programme National d’Autosuffisance en Riz – PNAR, le Programme agricole Quinquennal – PAQ, le Programme National d’Investissement Agricole (PNIA), le Programme dont l’objectif majeur est de faire passer le taux de pauvreté de 50,7 % en 2005 à 17 % en l’an 2020) ; et plus précisément dans la vallée afin d’assurer l’autosuffisance alimentaire à travers le pays. Si cette vallée est un don de la nature, il nous revient de bien l’aménager pour une meilleure exploitation car l’économie sénégalaise est encore tributaire du secteur agricole global. Avec plus de 80% de la population active du pays qui tire l’essentiel de leurs revenus de ce secteur dont la contribution dans le PIB est très importante.

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La vallée du fleuve Sénégal

Long de 1750 km, le fleuve Sénégal prend sa source dans le Fouta-Djalon en Guinée, traverse la partie occidentale du Mali, forme ensuite la frontière entre la Mauritanie et le Sénégal avant de se jeter dans l’océan Atlantique à Saint-Louis. Les 750km qui arrosent le Sénégal, constituent la vallée qu’on peut situer à trois niveaux.

La haute vallée : Elle s’étend de Bakel à une partie de Matam, avec très peu d’aménagements. La zone est majoritairement exploitée par la Société Nationale d’Aménagement et d’Exploitation des Terres du Delta du fleuve Sénégal (SAED) et le PRODAM (Projet de Développement Agricole de Matam).

En effet, la mission de la SAED est de promouvoir le développement de l’agriculture irriguée en rive gauche du fleuve Sénégal et de la Falémé. Elle se décline à travers les six domaines d’activités suivants : réalisation des investissements publics, maintenance des infrastructures hydroagricoles, gestion de l’eau et de l’environnement, aménagement rural et sécurisation foncière, appui à la mise en valeur et à la professionnalisation, appui à l’entrepreneuriat rural privé.

SIPA à Matam - Kanel

Le PRODAM pour sa part est un projet de développement agricole qui a été mis en place avec comme cadre la création des Sociétés d’Intensification de la Production Agricole (SIPA) qui sont des entreprises rurales privées gérées par des paysans et qui sont rémunérés à partir des bénéfices réalisés. Ils ont pour tâche :

  • Développer des périmètres horticoles pour plus de revenus pour les couches vulnérables,
  • créer des emplois pour lutter contre le chômage des jeunes en les encourageant au travail de la terre au lieu de se lancer à l’immigration clandestine.
  •  améliorer la sécurité alimentaire et nutritionnelle des ménages
  •  lutter contre la pauvreté en permettant aux populations de s’enrichir grâce à leurs productions agricoles
  • Varier les productions agricoles ;
  • Exploiter les zones non cultivables.

« Les populations qui travaillent sur ces périmètres agricoles du projet sont non seulement bien formés mais aussi elles gagnent dignement leur vie. Avec ce projet, les rendements se sont considérablement augmentés, les femmes deviennent de plus en plus autonomes et le flux migratoire des jeunes à beaucoup diminuer dans la zone » confie un habitant.

La moyenne vallée : Celle-ci va de Matam à Dagana dans le département de Podor. Moyennement aménagée, cette zone est beaucoup plus exploitée par les populations sur place dans le cadre des PPV –Petits Périmètre Villageois, pour la culture de maïs, riz, maraîchage et autres.

Ici, nous sommes dans un champ de riz de 8ha, d’un citoyen de la commune de Demette (extrême nord du pays à la frontière Sénégalo-Mauritanienne au long du fleuve Sénégal). Un ancien aventurier qui a longtemps séjourné en Côte d’Ivoire et au Congo, est revenu au pays pour s’adonner à l’agriculture. « Nous alternons durant l’année la culture du riz (Avril-Novembre) et du maïs (Décembre-Mars), cela pour maintenir la fertilité du sol. En ce moment nous avons semé les pépinières en vue de préparer la campagne hivernale, et après l’hivernage nous labourons de nouveau la terre pour la campagne maïs » affirme-t-il.

Le delta : il va de Dagana à la mer, ici tout est aménagé et à dominance riz et autre culture industriel notamment la canne à sucre, la tomate, l’oignon… C’est ici que provient la plupart des céréales et légumes consommés à travers le pays, ainsi que le sucre national fabriqué à partir des plantations de canne à sucre de Richard Toll.

canne à sucre Richard Toll

Considéré comme le cœur du Sénégal, le delta constitue la zone la plus prolifique agricole du pays. Avec plus 140 000ha dans le département de Podor, le delta, une zone bien aménagé dont la bonne exploitation permettra sans doute de faire du Sénégal le grenier ouest Africain comme l’évoquait le Président de la République Macky Sall le mois dernier (23 avril) lors de la remise des tracteurs aux paysans en guise d’ouverture de la campagne agricole. « En effet, j’ambitionne de construire une agriculture moderne compétitive, une agriculture durable, apte à assurer la transformation structurelle de notre économie » disait-il, avant d’ajouter que “cet engagement vise à renforcer cette agriculture moderne et en faire une agriculture adaptée et intégrée, fondée sur le savoir-faire mais aussi sur la technologie”.

Macky Sall à la Cérémonie de remise de matériel agricole au Grand Théâtre
                                                       Macky Sall à la Cérémonie de remise de matériel agricole au Grand Théâtre

Situation Phytosanitaire de la zone

Plusieurs programmes sont élaborés chaque année pour l’amélioration des conditions de productions des paysans. Malgré ces efforts, il n’en demeure pas moins que les paysans font face à d’énormes difficultés liées surtout à l’envahissement de leurs cultures par les insectes, notamment le Gryllotalpaafricana (grillon noir), les oiseaux granivores et autres rongeurs. Ce qui explique d’ailleurs quelques abandons des cultures avant la maturation. Des pratiques de traitements doivent être conseillées aux paysans en fonction des stades de développement du champ pour éviter les piqueurs suceurs très souvent présents dans certaines zones dans les champs de riz en phase de maturation. Selon l’expert en Mesures Sanitaires et Phytosanitaires, au-delà de tous les aménagements et réhabilitation des champs et périmètres cultivables, l’on doit accorder une attention particulière au contrôle phytosanitaire qui assurera une production garantie.

Produits phytosanitaires dans un Champ Agricole

Les défis et opportunités

La vallée qui est un don de la nature, offre d’énormes opportunités pour le Sénégal et même l’Afrique de manière générale si elle est bien aménagée pour une meilleure exploitation, car l’économie Sénégalaise reste encore tributaire du secteur agricole.

Défis

  • Former les producteurs aux nouvelles techniques agricoles ;
  • Aménager les différentes zones de la vallée pour une meilleure exploitation ;
  • Faciliter aux producteurs, l’accès aux terres cultivables, aux semences, et aux intrants agricoles … ;
  • Mettre à la disposition des producteurs des outils de travail adéquats pour augmenter la production ;
  • L’accès aux financements des cultures porteuses et à l’eau (irrigation);
  • Aider les producteurs à pouvoir écouler leurs productions ;
  • Mise en place des structures de transformations des produits agricoles, fruits et légumes …;
  • Amélioration de l’attractivité des métiers agricoles et ruraux ;
  • Création de nouveaux marchés pour l’agriculture locale.

Pour Alhousseyne Moctar HANNE; « la nature nous a doté de tous les éléments nécessaires (la terre fertile, les cours d’eau, le soleil, le climat …) pour faire de cette zone, la Californie ouest Africaine ». L’expert phytosanitaire affirme qu’« une seule usine de séchage d’oignon dont l’Angleterre en a besoin, le Sénégal pourrait beaucoup bénéficier de sa production d’oignon comme l’Egypte, qui exporte tout le temps ses oignons séchés vers l’Europe». Idem pour l’arachide dont des milliers de tonnes n’ont pu être exportées lors de la campagne précédente.

Opportunités

  • Apport considérable au PIB et à l’économie du pays ;
  • Réduction du chômage chez les jeunes et les femmes ;
  • Réduction du nombre des candidats à l’immigration clandestine dans certaines zones du pays ;
  • Amélioration de la sécurité alimentaire et nutritionnelle ;
  • Amélioration des conditions de vie des populations (lutte contre la pauvreté) ;
  • La vallée du fleuve Sénégal dispose de fortes potentialités en terres aménageables pour le riz irrigué,
  • La production du riz irrigué présente les meilleurs rendements en Afrique (5-7 tonnes par ha) ;

En conclusion, l’agriculture est le secteur capable de réduire considérablement le taux de chômage, assurer le développement agricole pour réussir l’autosuffisance alimentaire. Selon l’Agence Nationale de Statistique et de la Démographie au Sénégal (ANSD), le problème d’emploi touche plus de personnes diplômés de l’enseignement supérieur (entre 20 et 35 ans) à savoir 12,1%  de non diplômé ; 15,7% CEP/CFEE ; 15,5 Bac/BT/DT ; 15,2% Bac +2 et 22,2% pour les diplômés supérieur à bac +2.

 « Il est évident qu’avec une courte formation dans les techniques et pratiques agricoles, l’agriculture peut recueillir tous ces jeunes qui ont sans doute d’énormes compétences à faire valoir sur les milliers d’hectares aménageables, afin de faire en sorte que la terre puisse nourrir les hommes » affirme, Monsieur Ibrahima Diop, ancien de l’ENSA, Ecole Nationale de l’Agriculture de Thiès, aujourd’hui à la retraite.

                       T B B – www.laviesenegalaise.com

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