CHRONIQUE : Me Abdoulaye Wade, Ce Vieil Absent Jamais Absent
De 1974 à ce jour, par ses moindres actes ou ses minimes mots, ce vieux Wade assiège éperdument le cerveau de ses adversaires et occupe passionnément la pensée de ses partisans. Il s’attache stratégiquement à inquiéter les uns et manœuvre intelligemment à nourrir l’espoir des autres.
Senghor ne cessait de faire allusion à sa personne. Diouf se souciait de ses moindres gestes. A 74 ans, âge où Senghor quittait le pouvoir, il le remporte face à Diouf avant de le perdre face à un de ses produits politiques qui a refusé de fléchir devant sa volonté mobutesque de transmettre le pouvoir à son fils.
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Le vieil homme a aujourd’hui 90 ans. D’autres disent plus. Ayant perdu le pouvoir et se retrouvant avec un parti qui ne dispose plus de meneur de foule, encore moins d’un traceur de destin, il continue son jeu, promettant la mort anticipée à ceux qui épient son extinction et empêchant son successeur Macky Sall de dormir tranquille. Et que l’actuel locataire de l’Avenue Roume qui préside l’APR et la République le dise ou non, son vieux prédécesseur le fait valser d’une idée politique à une vision d’Etat.
Pourtant, le PDS n’est plus ce qu’il fut, exempt de leader charismatique, débarrassé de point de convergence et étrillé de chef. Ce parti n’a jamais, jamais, jamais et jamais existé. N’a existé dans le champ politique sénégalais que Abdoulaye Wade. Ce fut en lui seul que les apocryphes libéraux ont plus cru qu’au libéralisme qu’il a prôné pour intégrer la juteuse Internationale Libérale. Il est d’ailleurs extrêmement rare, à l’exception de certains anciens Ministres comme Lamine Ba et Mamadou Diagne Fada, de voir un authentique responsable ou militant libéral donner une explication capillaire du libéralisme.
Seul Abdoulaye Wade a existé. Aucun de ceux qui prétendent être son héritier ou son épigone n’est authentiquement libéral. Le vieil homme sait mieux que quiconque qu’il demeure, tant qu’il est en vie, diastole et systole de ceux qui furent avec lui ou sont encore avec lui.
Seul Karim existe
La petitesse d’un militant est de voir en un néophyte qui ne connait aucun combat et qui n’a jamais été dans la fugace arène de la lutte pour le triomphe des idéaux voir en un fils de Général l’incarnation d’un espoir. Et c’est le drame de ceux qui crient encore le nom du fils de Wade. Les plus intelligents ont su partir et les plus ingénieux sont restés dans le parti au giron d’un mouvement politique qui ne s’accommode ni ne courbettes, ni de compromissions.
Jamais Wade n’a eu de respect pour les gens du PDS. Jamais il n’a cru en un génie atavique de membres et responsables du PDS. Il n’a cru qu’en lui et il a fallu son accès au pouvoir en 2000 et ses premiers pas de gouvernance pour croire en quelqu’un d’autre : son sérum, le produit de son sang et du sang hexagonal, Karim, dit Meissa, Wade, un Meissa qui n’a jailli que pour intégrer l’authentique civilisation du Walo, du Kajoor, du Baol, du Sine et du Saloum!
Souleymane Ndéné Ndiaye l’a vite compris et l’a refusé en l’assumant. Macky sall l’a suivi dans cette récusation et en a tiré les gains.
Malheureusement, le faux, la malhonnêteté, la fourberie, la tartufferie et l’imposture sont et demeurent les cinq doigts de la main politique. Ceux qui louaient, encensaient et divinisaient Karim de Wade, sont ceux-là même qui, aujourd’hui, chantent et flagornent Macky Sall. Leurs masques sont tombés depuis longtemps. La « Génération du Concret » ne fut que « la Génération que les cons créent » !
Laisser Macky Sall faire face à son destin et procéder au renouvellement du personnel politique dirigeant sénégalais seraient, pour ces anciens de Wade et de son fils Karim, une question de dignité !
Comment Wade se joue de Macky
Le jeu politique est chez Wade une éternelle délectation. Ce n’est pas pour lui un sacerdoce. C’est pourquoi, étant au pouvoir ou hors du pouvoir, il se passionne de frivolité et d’agrément à poser des actes banaux sujets de débats. Macky Sall, Président de la République, est en visite d’Etat en France, pays qui lui sert d’asile. Pour se faire parler et alimenter un débat qui le met au devant de la scène, il fomente intelligemment une absence dont la finalité inventée serait de ne pas gêner son successeur. Le prétexte est faux et bassement politicien et il en réussit le coup.
En fait, Wade se joue de Macky et du Sénégalais. Pour un vieil homme de son âge, ayant un passé et ne disposant d’aucun avenir, se consacrer sagement à une réclusion serait plus déférent que de se comporter en un gamin qui sautille d’un arbre à un autre pour jouer au anthropoïde dépassé et déphasé.
Une certaine presse jargonne sur son voyage. Des proches de Macky Sall zézayent sur les raisons de ce voyage. D’autres murmurent in petto à celui sur sa destinée. Et c’est justement là où il réussit son jeu d’espiègle, d’un vieillard attendu ailleurs que dans le terrain d’enfantillage. Mais une seule et unique raison explique son attitude : son Karim est incapable de porter un quelconque combat. Pauvre Wadie !
Le Piroguier