Trouver une maison, un studio voire une chambre à louer en cette période d’hivernage relève du parcours d’un combattant à Pikine. Non pas parce qu’il en manque. Juste parce que l’implication d’une nouvelle race de courtiers qui ne vivent que de commissions complique les choses aux locataires.
Assise sous un abri de fortune sis à Pikine Tally Bou Mack, un bébé sur le dos, la dame Farmata Sylla est à la recherche d’un studio à louer. Elle vit avec son époux et ses trois enfants ainsi que sa propre sœur qui l’aide dans les travaux domestiques. Logiquement, elle devrait disposer d’un appartement afin de mettre toute la famille à l’aise. Malheureusement, les prix pratiqués par les agences immobilières sont élevés et le recours aux courtiers est loin de faire l’affaire. Pour la simple raison que ces derniers exigent le paiement d’une commission représentant souvent le montant à payer pour le mois. « Les plus traitables exigent la moitié de la mensualité à payer au bailleur, mais il y en a qui ne touchent pas moins de la somme globale à payer par mois en guise de commission », se lamente Farmata Sylla. « Ces gens-là ne vivent que de rente surtout à Pikine où tout le monde veut habiter », ajoute-elle. Sur ces entrefaites surgit une autre femme qui, après avoir lancé des salutations collectives, s’installe aussitôt sans attendre de se faire prier. Ngoné Seck est venue, elle aussi, pour rencontrer un courtier capable de l’aider à trouver une chambre à louer. « C’est une connaissance qui m’a indiqué ce lieu en me précisant que j’aurai de fortes chances de rencontrer un courtier », déclare-t-elle.
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C’est une femme assise derrière une table jonchée de fruits (mangues, oranges, etc.) qui intervient en rassurant les deux chercheuses de gîte à louer. « C’est ici que les courtiers ont l’habitude de se regrouper ; si vous daignez faire preuve d’un tant soit de patience, ils vont bientôt débarquer », affirme la vendeuse. Les deux femmes patientent une demi-heure, contrairement à d’autres demandeurs de chambres ou d’appartements à louer qui, après avoir constaté l’absence des courtiers, préfèrent repartir en promettant de repasser quelques instants plus tard. Soudain, Vieux Diop surgit dans un caftan bleu foncé, un bonnet bien vissé sur la tête. Un bref instant de salamalecs et c’est Farmata qui l’interpelle en premier en ces termes: « Tonton, je voudrais un studio à louer et j’aimerais savoir si vous êtes disposé à m’aider », dit-elle au vieux qui, après l’avoir écouté, fait mine d’hésiter un instant avant de réagir.
Une commission excessive à verser
« J’en ai vu un à la technopole. Le propriétaire le loue à cent mille francs le mois, mais il réclame trois mois d’avance », soutient le vieux, l’air serein. La femme porta la paume de sa main droite sur sa bouche et manifeste ainsi son étonnement face à au montant de trois cents mille qu’elle devra débourser pour pouvoir signer le contrat de location dudit studio. « C’est trop cher, je me débrouille pour faire vivre ma progéniture avec l’aide de mon mari qui n’est pas du tout aisé financièrement », répond Farmata Sylla. « J’habite Pikine Icotaf, mais le propriétaire des deux chambres que j’occupe avec ma famille m’avait donné un délai qui va expirer demain pour lui remettre les clés de ses chambres. Je suis inquiète car je n’ai pas les moyens de louer un studio à cent mille le mois », ajoute-t-elle. Ngoné Seck sort du silence dans lequel elle était plongée jusqu’ici et soutient: « Ça alors ! Moi, je n’ai besoin que d’une chambre, certainement je vais payer moins », lance-t-elle. « En tous cas, moi, je n’ai pas une chambre isolée à louer, mais une chose est sûre, quel que soit le montant à payer pour la chambre que tu vas trouver, tu seras obligée de verser trois mois d’avance. Les deux mois iront au bailleur et le troisième au courtier », réplique Vieux Diop.
L’offre du vieux ne semblant pas trouver preneur ni auprès de Farmata Sylla, ni auprès de Ngoné Seck. La première nommée s’interroge: « Je me demande où pourrais-je trouver ce que je cherche ? » « Que Dieu me vienne en aide ! », prie-t-elle. C’est la même vendeuse qui réagit à nouveau en leur lançant : « Ou bien vous revenez demain dans l’espoir de rencontrer d’autres courtiers ou bien vous continuez à attendre, peut-être que d’autres courtiers vont se présenter bientôt ». Déçues, Farmata Sylla et Ngoné Seck prient Vieux Diop de prendre leurs numéros de téléphone au cas où il trouverait entre-temps des occasions qui pourraient les intéresser.
Reportage de Abdou DIOP