Adji Sarr «coule» Macky Sall

L’affaire Ousmane Sonko contre Adji Sarr a abîmé l’image du président Macky Sall. En Afrique comme dans le pays, la plupart des critiques sévères s’abattent sur le président de la République alors que l’objectif était, sans doute, de ruiner les espoirs de Sonko. Qui pouvait croire qu’Adji Sarr finirait par « détruire » Macky Sall ?

Le verdict du procès Ousmane Sonko contre Adji Sarr déjoue tous les pronostics. Le grand perdant de cette affaire qui a tenu en haleine tout le pays est sans conteste le président Macky Sall. Lui dont les partisans juraient la main sur le cœur ne pas être mêlé aux « judiciaires d’Ousmane Sonko ». Sitôt, en effet, le verdict tombé, une vague de violence sans précédent s’est abattue dans le pays. Des manifestants contre la condamnation de Sonko auxquels se sont joints des pilleurs et des voleurs ont pris en étau Dakar, sa banlieue et certaines villes comme Ziguinchor et Saint-Louis. Banques, essenceries, grandes surfaces, biens publics et privés ont été littéralement détruits dans certains quartiers. Le TER et le BRT, symboles de bâtisseur de Macky Sall sont profanés. Il s’en est suivi de chaudes échauffourées avec les forces de sécurité et de défense. Le bilan officiel des affrontements fait état de 16 morts, 500 arrestations et plusieurs blessés. L’économie s’arrête de tourner dans le pays. La peur s’installe. Ousmane Sonko, revenu de Ziguinchor est jusque-là bloqué à son domicile par les forces de sécurité. Il ne peut sortir de chez lui, ni recevoir de visiteur. Cette folle ambiance qui a tenaillé le pays fait le tour du monde. L’Onu, la Cedeao, l’Union européenne expriment leur inquiétude. Les Usa et la France appellent à la paix. L’opinion africaine se range derrière l’opposition en s’élevant contre le 3ème mandat, « source du mal ».

Macky Sall qui jouissait dans le continent d’une réelle admiration voit son image craquelée. A l’Union africaine, à la Cedeao comme à l’Uemoa, le chef de l’Etat sénégalais bénéficiait de l’estime de ses pairs. Une mission de paix menée par six dirigeants africains est annoncée « dès que possible » à Kiev et à Moscou pour tenter de « trouver une solution pacifique » au conflit. Il s’agit du président sud-africain, Cyril Ramaphosa qui a officialisé la nouvelle de l’envoi de cette mission, des présidents du Sénégal, de la Zambie, du Congo, de l’Ouganda et de l’Égypte. A l’intérieur même du pays, la cote du président Sall est à rude épreuve même si des instruments de mesure sont encore interdits au Sénégal. La plupart des intervenants sur la bande FM s’en prennent au chef de l’Etat et l’accusent, à tort ou à raison, d’être responsable de cette folie qui s’est abattue sur Dakar, sa banlieue et certaines villes du pays. Pourtant, à plusieurs reprises, il y avait bien possibilité de sortir du guêpier Adji Sarr.

Lorsqu’en mars 2021, Ousmane Sonko alors avait été convoqué pour être entendu à la section de recherches de Colobane, des événements tragiques ont éclaté occasionnant 14 morts, plusieurs blessés et de nombreuses arrestations. Le défunt juge d’instruction Samba Sall, libère le président de Pastef et le met sous contrôle judiciaire, après quelques jours de violents affrontements. On croyait alors que la réalpolitique allait supplanter l’esprit de vengeance. Beaucoup estimaient, en effet, que la plaignante allait être discrètement « convaincue » par la mouvance présidentielle de retirer sa plainte. C’est tout le contraire ! Le chef de l’Etat présidant une manifestation à l’emploi des jeunes au Cicad de Diamniadio avertit : « Ce qui s’est passé en mars 2021 ne se reproduira plus ! »
Le temps file, les blessures commencent à se cicatriser. Rien n’est perdu pour se rattraper et enterrer cette affaire trop inflammable. Les regards se braquent alors sur le juge Omar Mahame Diallo qui hérite du dossier Ousmane Sonko contre Adji Sarr. Il mène son interrogatoire presque dans la rue. Car, presque aucune pièce des supposés viols répétés avec menace de mort n’était plus un mystère pour le public. Plusieurs spécialistes et avocats dont le professeur de droit pénal Ndiack Fall de l’Ucad trouvent le dossier suffisamment léger pour le fermer par un non-lieu. Il fallait compter avec le juge Diallo qui, à la surprise quasi-générale, envoie Ousmane Sonko à la chambre criminelle.

L’affaire est alors enrôlée, jugée puis mis en délibéré le 1er juin dernier. Là aussi, on espère qu’un « clairvoyant » va « tordre la main » au président en raison du caractère explosif de ce procès. Le procureur de la République ouvre dans son réquisitoire une brèche qui installe visiblement le doute dans « son intime conviction ». Soit Ousmane Sonko est coupable de viol, soit il l’est pour « corruption de la jeunesse ». Le président du tribunal rejette le viol et retient « la corruption de jeunesse » et condamne Sonko à 2 ans de prison ferme. L’horizon s’assombrit pour le leader de Pastef qui doit non seulement aller en prison, mais aussi manquer la présidentielle de 2024. La violence s’installe et écorne sérieusement l’image de la démocratie sénégalaise et celle de son président. Adji Sarr a fini par « détruire » Macky Sall. Qui pouvait deviner cet épilogue ? Personne sûrement !


Félix DIAGNElaviesenegalaise.com

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