Wade divise l’opposition

La décision de l’ancien président de la République, Abdoulaye Wade, de ne plus engager son parti et sa coalition dans des élections organisées par le président Macky Sall et son régime, n’enchante pas toute l’opposition sénégalaise. Mais elle ne déplait pas non plus dans certaines franges de celle-ci où on estime que le “Pape du Sopi” a toutes les raisons de se radicaliser à ce point.

Si l’ancien président de la République, Me Abdoulaye Wade, a ce don de rallier souvent toute l’opposition dans ses combats démocratiques, il ne semble pas, cette fois-ci, convaincre celle-ci.

Sa décision de ne plus participer à des élections organisées par l’actuel président de la République et son régime, laisse une partie de l’opposition perplexe. Mieux, elle divise les opposants au régime de Macky Sall qui restent partagés sur la question. “Quand Wade dit qu’il ne va plus participer à des élections organisées par Macky Sall, c’est certainement en connaissance de cause. Quelque part, si le système mis en place nous a valu toutes les difficultés qui consacrent une non-élection et un hold-up, il a peut-être ses raisons. Tant que c’est eux qui organisent et de cette manière, il est inutile de participer à des élections, cela veut dire que les jeux sont déjà faits et les résultats déjà connus”, estime d’emblée le président du comité électoral de Dakar de la coalition Mankoo Taxawu Senegaal (Mts) Cheikh Guèye, par ailleurs maire de la commune de Dieuppeul-Derklé.

Cependant, si au sein de la coalition Mts on estime que le “Pape du Sopi” a ses propres raisons l’obligeant à se radicaliser ainsi au lendemain des élections législatives, dans certaines franges de l’opposition, l’on juge que rien ne peut justifier la politique de la chaise vide, surtout dans le contexte actuel du pays. “Nous ne sommes pas d’accord avec cette posture de l’ancien président Abdoulaye Wade. Tout le monde reconnait qu’il y a eu des dysfonctionnements extrêmement graves lors des élections législatives du 30 juillet dernier et qui ont été surtout préjudiciables à l’opposition de manière générale, et non pas au parti au pouvoir qui en a profité. Mais cela ne suffit pas à dire qu’il ne faut plus participer à des élections organisées par le régime”, déclare Abdou Karim Fall, membre de la Coalition Joyyanti pilotée par l’ancien Premier ministre Abdoul Mbaye. Selon le leader du Parti africain pour la renaissance et l’émergence (Pare), boycotter les futures élections ouvrirait un boulevard immense à Macky Sall pour se faire réélire très facilement. “Je pense que là n’est pas le combat.

 Le combat, aujourd’hui, c’est que l’opposition s’organise et fasse face au régime pour exiger la nomination d’une personnalité neutre à la tête du ministère de l’Intérieur et que le processus électoral soit géré de manière concertée pour qu’on arrive à régler tous les dysfonctionnements notés lors des élections passées”, estime-t-il. “Macky Sall risque d’être réélu, si…”

 Il est conforté dans sa posture par le porte-parole de Yoonu Askan Wi, parti membre de la coalition Ndawi Askan Wi de l’inspecteur principal des impôts et des domaines Ousmane Sonko.

Madièye Mbodj, qui reconnait à Abdoulaye Wade et à tous ses alliés cette liberté de ne plus participer à aucune élection organisée par Macky Sall et son régime, est d’avis que cette démarche ne saurait produire les résultats escomptés pour avoir un processus électoral transparent. Selon ce militant de la gauche sénégalaise, en politique, rien ne se donne gratuitement. “Abdoulaye Wade et ses camarades sont libres d’avoir cette position. Nous, notre position, c’est que nous devons continuer à nous battre pour exiger que les élections soient organisées par une autorité indépendante. Nous avons vu à l’épreuve que le ministre de l’Intérieur est un membre du parti présidentiel, en plus d’être le responsable de la coordination de l’Apr à Podor. Il n’a pas la culture démocratique qu’il faut pour organiser des élections sans manipulations et sans tricherie. Nous continuerons de nous battre pour exiger qu’il démissionne”, fulmine-t-il.

Non sans rappeler qu’au Sénégal, il y a toujours eu des batailles démocratiques qui ont permis d’installer l’Onel, ensuite la Cena, même si aujourd’hui, cette structure en charge de la supervision des élections a montré, selon lui, qu’elle n’est pas capable de neutralité. “Il faut tirer les leçons de tout cela et continuer à se battre. Nous n’allons pas boycotter des élections”, soutient-il.

A moins de deux ans de élections, la présidentielle et les locales de 2019, ni le contexte ni la situation ne prêtent à un boycott, selon Abdou Karim Fall. “La politique de la chaise vide n’est pas raisonnable en la circonstance, parce que nous allons, à moins de deux ans, à une élection présidentielle et si les candidats des partis qui pourraient battre Macky Sall décident de boycotter, il risque d’être réélu. Or, l’opposition se bat pour que Macky Sall ne soit pas réélu”.

A cet effet, il estime que ne plus participer aux élections organisées par Macky Sall n’est pas la meilleure stratégie. “Je pense que c’est une affirmation gratuite, mais le Pds n’irait pas dans le sens, comme la majorité de l’opposition, de boycotter le présidentielle de 2019. Il faut imposer un rapport de force parce que rien ne se donne sur un plateau d’argent. L’histoire politique récente du Sénégal l’a démontré”, souligne-t-il.

 

      EnQuete

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.