Respect des droits humains en Gambie : Les exigences d’Amnesty

La Gambie toujours au banc des accusés. Dans un rapport qu’elle  rend public, ce mercredi, Amnesty international met à nu les nombreuses violations des droits humains par le régime de Yahya Jammeh et liste plusieurs exigences devant contribuer à mettre fin au règne de la terreur dans ce pays voisin du Sénégal.

Les nombreuses violations des droits humains perpétrées par le régime de Yahya Jammeh ont amené Amnesty international (Ai) à pro­duire un rapport qui sera ren­du public ce jeudi. Dans ce document, l’Ong basée à Londres, pour éviter que de pa­reilles exactions se reproduisent, a dressé un certain nombre de recommandations à l’endroit du régime de terreur de Jammeh. Aussi, attend-elle du gouvernement gambien qu’il agisse sans délai «pour garantir le respect des droits humains de tous les Gambiens à l’approche des élections de décembre et au-delà».

Pour la libération sans délai de tous les prisonniers d’opinion

Ai exige aussi, entre autres, de Banjul la libération «sans délai et sans condition de tous les prisonniers d’opinion tels que l’avocat Ousainou Darboe, tous les membres du Parti démocratique uni (Udp), les manifestants et les passants qui ont été arrêtés entre les mois d’avril et mai 2016, Amadou Sanneh, Alhagie Sambou Fatty, Malang Fatty, Imam Sawaneh et Ebrima Manneh». Est aussi attendue de l’Etat gambien la libération immédiate de «toutes les personnes actuellement détenues de façon illégale ou les inculpés d’une infraction prévue par la loi dans le cadre d’un procès équitable en excluant le recours à la peine de mort». «Il s’agit, entre autres, de prisonniers politiques et de victimes de disparition forcée comme l’imam Omar Colley et l’imam Cherno Gassama ainsi que l’ancien ministre adjoint de l’Agriculture, Ousman Jammeh», énumère le document qui demande l’autorisation sans délai de «toutes ces personnes à consulter un avocat, à recevoir la visite de leurs proches et à bénéficier de tous les soins médicaux dont elles pourraient avoir besoin».

Respect de la liberté d’expression et abrogation de lois restrictives

L’Ong milite pour le respect de «la liberté d’expression, d’association et de réunion de tous les Gambiens, y compris les journalistes, les chefs de l’opposition, les opposants réels ou supposés au gouvernement et les défenseurs des droits humains notamment en période électorale sans crainte d’être arrêtés, placés en détention, victimes d’actes d’intimidation ou harcelés».
L’abrogation des lois restrictives en matière de liberté d’expression ou leur mise en conformité aux obligations et aux engagements constitutionnels ainsi qu’internationaux et régionaux relatifs aux droits humains est aussi attendue de l’Etat gambien. Tout comme l’abrogation des «lois restreignant la liberté d’association et de réunion ou les rendre conformes aux obligations et aux engagements constitutionnels ainsi qu’internationaux et régionaux relatifs aux droits humains, notamment l’infraction pour organisation d’un défilé sans autorisation en vertu de la loi relative à l’ordre public (article 5(5) (a) et (b)) et l’infraction de réunion illégale en vertu du Code pénal».

A propos de la police, le document invite le régime de Yahya Jammeh à «ordonner publiquement» à celle-ci «de ne pas faire un usage excessif de la force, notamment de grenades lacrymogènes et de balles en caoutchouc, pour disperser des rassemblements pacifiques, y compris lorsque les forces de police croient que les organisateurs n’ont pas respecté la loi relative à l’ordre public qui exige l’obtention d’une autorisation». La même invite est faite aussi au gouvernement locale en direction des services de radio et de télévision gambiens afin que ceux-ci permettent «à l’opposition et aux voix dissidentes de jouir d’une égalité d’accès».

Il est aussi demandé au gouvernement gambien d’ «ordonner publiquement et sans délai à la police, à l’armée et à l’Agence nationale de renseignement (Nia) de mettre fin aux arrestations et aux détentions illégales, à la détention au secret et aux disparitions forcées et notamment de cesser de maintenir en détention au-delà du délai de 72 heures tel que cela est prévu par la Constitution gambienne». La même requête est aussi formulée pour que toutes les forces de sécurité gambiennes relèvent «de ses fonctions tout officier soupçonné d’être impliqué dans des violations de droits humains, en particulier le recours excessif à la force, aux arrestations arbitraires et à la torture, jusqu’à ce que les allégations le concernant puissent faire l’objet d’une enquête indépendante, approfondie, impartiale et transparente».

Plaidant pour une levée «sans délai (de) toute obstruction pesant sur internet et sur les sites d’information en ligne», Amnesty prône la réforme des «vastes pouvoirs conférés aux agences nationales de sécurité pour «surveiller, intercepter et stocker les communications» en vertu de la loi sur l’information et la communication de 2009», l’introduction des «garanties nécessaires comme celle du placement sous contrôle judiciaire et la possibilité de contester la légalité de ces dispositions devant un tribunal» ; de même que le respect «de façon générale (des) droits à la vie privée et à la liberté d’expression ; (des) ar­res­tations et mises en détention arbitraires».

Attentes par rapport à la Cedeao, à l’Ua, l’Ue, les Etats-Unis et autres

Amnesty international souhaite que la Cedeao et l’Union africaine demandent publiquement la libération de tous les détenus politiques en Gambie. De même que la condamnation publique des «violations des droits humains perpétrées en Gambie de manière régulière» et l’évocation «en privé (de) ces préoccupations avec les représentants du gouvernement à tous les niveaux». Mais aussi la mise en place d’une Commission d’enquête indépendante conjointe Cedeao-Ua «pour faire la lumière sur les arrestations, actes de  torture et autres mauvais traitements dont ont fait l’objet des manifestants, notamment des membres du Parti démocratique unifié, entre avril et mai 2016».
L’Ong plaide pour que la situation des droits humains en Gambie soit discutée «à la prochaine Conférence des chefs d’État et de gouvernement de la Cedeao» et pour l’adoption «d’une résolution spécifique destinée aux autorités gambiennes afin qu’elles appliquent pleinement les décisions en suspens de la Cour de justice de la Cedeao». Mais aussi d’«énoncer clairement et fortement aux autorités gambiennes les possibles conséquences  en cas de non-respect de la résolution».

Une condamnation régulière et publique des violations graves des droits humains en Gambie est également attendue de la part des États membres du Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies, de l’Union européenne, des États-Unis, du Royaume-Uni, des pays donateurs et d’autres gouvernements concernés. De même que des pressions sur le gouvernement gambien «afin qu’il se conforme pleinement et effectivement aux arrêts de la Cour de justice de la Cedeao dans les cas de Deyda Hydara, Ebrima Manneh et Musa Saidykhan».

Pour les élections de 2016, Ai veut que les Etats et organisations ci-dessus demandent  que «tout observateur électoral déployé avant ou pendant soit doté d’un mandat pour rassembler des informations sur les violations et les atteintes des droits humains et pour les signaler».

Le Quotidien

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.